Lettre 903 : Henri Basnage de Beauval à François Pinsson des Riolles

[La Haye, le 8 janvier 1693]

Monsieur
J’ai si mal repondu à vos honnêtetez [1], que je jugerois moi mesme que je ne les merite nullement, si je n’en avois pas conservé dans mon esprit plus de reconnoissance, que je ne vous en ai marqué. Je ne me justifie point là dessus, et j’avoüe que je ne puis excuser ma negligence à vous remercier des peines que vous avez prises bien des fois de m’enrichir de quelques pieces curieuses : et de vostre part et de celle de vos amis. N’en jugez point par là je vous en prie, et ne comptez point à la rigueur là dessus. Je vous assûre que j’ai ressenti vostre honnêteté autant que je le devois[.] Et d’ailleurs vostre merite m’est assez connu pour faire tout le cas que je dois de tout ce qui vient de vous. Sur tout vos remarques sur le chapitre de Mr Menage m’ont eté tres utiles, et je les ai inserées dans le dernier journal que j’ai donné [i]. Je vous en rends mille graces, et toutes les fois que vous voudrez bien vous souvenir aussi obligeamment de moi, vous me ferez un plaisir extrême. Si quelque chose ici excitoit vostre curiosité, je tâcherois de m’acquitter de ce que vous avez eu la bonté de faire pour moi, et de vous marquer combien je vous estime, et combien je suis Monsieur vostre tres humble et tres obeyssant serviteur
Basnage Bauval ce 8 de janv[ier] 1693

 

A Monsieur/ Monsieur Pinsson advocat/ au Parlement/ A Paris •

Notes :

[1Aucune des lettres de Pinsson des Riolles à Basnage de Beauval n’a pu être retrouvée.

[iHOS, novembre 1692, art. XIII : « Extraits de diverses lettres », p.131-134 : « Je ( M. P[insson]) ne doute point Mr que vous n’ayez été affligé de la mort de Mr Menage : et vous aviez trop de part à son estime, pour croire que vous ne vous intéressiez pas à sa memoire. Bien des gens ont un peu grondé contre l’auteur du Journal des savans de Paris, qui parmi quelques loüanges a lâché quelques traits perçans contre le deffunt. Vous savez aussi bien que moi qu’il étoit né en 1613 de Guillaume Menage avocat du roi à Angers. Il suivit d’abord le barreau, et puis il s’en degoûta, et se mit dans l’état ecclésiastique. Il se fit en peu de tems une fortune assez sûre, et assez tranquille pour se donner tout entier aux Muses. Elles furent l’objet de toutes ses assiduïtez. Jugez vous-même jusqu’où l’on peut aller par un travail infatigable, avec l’une des plus heureuses memoires du siecle. C’étoit selon moi et bien d’autres le Varron de nôtre tems. Il se fit bientôt des habitudes avec tous ceux qui étoient alors regardez comme les arbitres de la réputation des gens de Lettres, et comme les dispensateurs de la gloire. Aussi a-t-il été preconisé par 44 savans de compte fait. [...] L’une des premieres pieces qui parut de lui, fut la fameuse Requête des dictionnaires, qui chagrina tant l’Académie. On pretend que c’est ce qui l’a exclu d’être l’un des membres de cet illustre corps. Il est vrai cependant que s’il avoit voulu se remüer pour cela, cette Requête ne lui auroit pas fermé l’entrée, et l’on dit là-dessus ce bon mot : qu’il falloit condamner Mr Menage à être de l’Académie françoise, comme l’on condamne les jeunes gens à épouser les jeunes filles qu’ils ont déshonorées. L’Académie de Florence se fit un honneur de le mettre au nombre de ses membres. Il composa depuis ses Origines de la langue françoise, que l’on réimprime presentement in folio ; ses Remarques italiennes sur l’Aminte ; ses Notes sur Diogene Laërce réimprimées cette année à Amsterdam ; ses Mescolanze, qui sortent à ce que l’on m’a dit tout presenetement de dessous la presse, à Rotterdam chez Reinier Leers in-8°, son Anti-Baillet, qui contient ses démêlez avec Mr Baillet et quelques autres pieces connües de tout le monde. [...] l’on a dejà obtenu privilege pour imprimer des Menagiana, comme l’on a fait des Scaligerana, et des Casauboniana. »

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