Au très illustre ami, Théodore Jansson van Almeloveen, Pierre Bayle fait ses compliments
Ce livre, qui me plaît fort, vous revient beaucoup plus tard qu’il n’aurait fallu [1]. De là vient que vous êtes en droit d’attendre de moi des remerciements et des excuses pour ce long retard. Veuillez, s’il vous plaît, très célèbre et très bon ami, ne pas porter de jugement sur la promptitude de l’attention que je porterai à l’avenir à rendre les livres ; je voudrais que vous sachiez que désormais je serai plus consciencieux. Et certes vous l’auriez plus volontiers accepté si un événement inattendu, exceptionnel et désagréable ne vous avait contraint à payer le port ; même si la dépense à faire ne représente pas – n’est pas – grand-chose pour un homme aisé, il ne m’appartient pas de solliciter votre générosité au point que, lorsque vous me prêtez des livres pour que je les consulte, je vous expose à quelque dépense.
Faites mes compliments, s’il vous plaît, ainsi que ceux des convives de Rotterdam, au très distingué Muhlius [2], notre serviable ami. Portez-vous bien et favorisez-moi du souffle de votre générosité telle qu’elle m’a été accordée jusqu’ici. Les Leipzigois ont signalé certains traités ayant apparemment été édités que vous avez regardés comme promis et non publiés [3], mais cela a été indiqué sans aucune sévérité de censure mordante.
Encore une fois, portez-vous bien, homme qui m’êtes cher.
A Rotterdam aux calendes d’octobre 1692.
Notes :
[1] Bayle restitue enfin à Almeloveen l’exemplaire qu’il lui avait prêté de l’ouvrage de Leickher, Vie des jurisconsultes : voir Lettre 872, n.7.
[2] Sur Heinrich Muhlius, voir Lettre 878, n.6.
[3] Les Acta eruditorum (i.299) avaient présenté l’ouvrage d’ Almeloveen, Bibliotheca promissa et latens : sur cet ouvrage, voir Lettres 843, n.3, et 869, n.6.
