Au pasteur de notre temple, Monsieur Pichot [1], qui va rendre visite à ses amis roterdamois, il a semblé convenable qu’on vous adresse cette lettre, ce qui était visiblement de notre devoir non seulement mais surtout parce qu’il m’incombait de vous demander, comme je l’avais promis, de venir nous voir, nous autres, et que je vous récrive en effet en vous invitant instamment à faire cette excursion, que vous n’ayez effectivement pas reçu notre lettre à vous adressée et confiée aux cochers [2], ou que vous ayez été retenu pour quelque autre raison. Expliquez-moi maintenant, je vous en prie, en une note de votre main, ce qu’il en est. Dans votre rôle d’ami qui revient, je voudrais que vous me donniez, si un jour ou un autre vous pouviez vous en passer, le petit livre des délices des poètes belges [3], en deux tomes si je ne me trompe, pour que je puisse voir si, recueillies dans ces volumes, se trouvent les épigrammes de Pierre Scriverius [4], qui méritent certainement d’être réunies ailleurs dans une présentation savante et critique. Quant au contenu de celle-ci, si vous pouviez y contribuer, cela me plairait de voir cette contribution dans votre lettre, je m’attends à la trouver bien plus suave que le miel. Adieu. Ma parente vous adresse son salut.
Donnée à Gouda, le 4 e jour avant les Calendes d’avril 1693
Notes :
[1] François Pichot (?-1703), ancien pasteur de Montbazillac en Basse-Guyenne, exilé aux Provinces-Unies en 1684 ; il fut déclaré « appelable » en avril 1684 et appelé le 4 février 1685 à Gouda, où il fut installé le 6 mai 1685. Sur lui, voir aussi Lettre 244, n.38.
[2] Voir la lettre d’ Almeloveen à Bayle du 22 mars (Lettre 915).
[3] Almeloveen recherche l’ouvrage publié sous le nom de « Ranutius Gherus » [ Janus Gruterus] (éd.), Delitiæ C. Poetarum Belgicorum hujus superiorisque ævi illustrum (Francoforti 1614, 16°, 4 vol.).
[4] Pierre Scriverius (1576-1660), éditeur de la Batavia illustrata seu de Batavorum insula, Hollandia, Zelandia, Frisia, territorio trajectensi et Gelria scriptores varii notæ melioris nunc primum collecti, simulque editi, ex museo Petri Scriverii (Lugduni Batavorum 1609, 4°).