Lettre 1125 : Jean-Baptiste Dubos à Pierre Bayle
Si je scavois faire des compliments, c’est par là que je com[m]encerois toutes mes lettres. Vos hon[n]êtetez* en meritent des meilleurs : c’est un malheur pour vous que je sois peu propre à en faire.
Avant de repondre à vostre lettre du neuf de ce mois [1], je vous dires que je vous ai envoié un petit pacquet de curiositez, par Mr Bousseau de Dantzic [2] qui est parti ce matin pour Hollande. Vous i trouveré l’histoire du demeslé de Santeuil et des jesuites [3] d’une meilleure main que la premiere qui estoit de l’ abbé Faydit. La traduction du Santolius pœnitens passe ici malgré ce que dit l’autheur de l’histoire pour estre de Mr Racine [4], ce qui est certain c’est que Madame de Maintenon lui en a faict froid trois ou quatre jours durant. J’i ai joint le Santolius pendens [5], je pense vous avoir mandé que tout le monde le donne ici à Mr Rollin recteur de l’université[,] vous croyé bien que il n’a garde de l’avouer. Vous n’auré pas de peine à con[n]oistre que l’histoire du demeslé vient de chez les jesuites. Vous trouverez aussi dans le pacquet l’eloge de Mr de Cours par l’ abbé Genest [6] et la réponse de Mr Perrault aux Reflexions critiques de Mr Despreaux sur Longin [7], que vous m’avé témoigné avoir envie de voir. J’i ai joint le portrait de Mr Perrault [8] que je lui ai demandé pour vous. Le latin de Mr Francius [9] ne l’a point du tout chagriné, lors qu’il a embrassé le parti qu’il a pris il a dû s’attendre d’estre bien injurié • des pédants, et s’i est attendu. On va imprimer incessamment son 4 e [volume] des Paralelles [10], et ses Eloges des illustres Francois • sont imprimez et vont paroistre [11]. Ceux qui aiment l’honneur de la nation appréhendent bien que l’on n’en oste Mr Arnaud et Mr Pascal [12], sur ce qu’un misérable docteur de Sorbone nommé Precellés [13] a esté remontrer à Monsieur le chancelier [14]. Ce magistrat a conseillé à Mr Perrault de le faire, en lui disant bien néanmoints [ sic] qu’il l’en laissoit le maistre. Mais le plus grand danger vient de ce que Mr Bégon homme de faveur qui fait faire le receuil ap[p]réhendera par là de blesser la délicatesse des jésuites [15]. Ce n’est pas que ces derniers n’aient / pris la chose en galants hommes. Le P[ère] Bouhours • lorsque Mr Perrault lui fit montrer ces deux éloges par Mr l’abbé Dumas [16], les ap[p]rouva autant q[u]’un jésuite peut ap[p]rouver l’eloge de l’autheur des Provinciales et de la Fréquente Communion [17][,] soupçon[n]é d’avoir part encore à La Morale pratique [18]. Mais, com[m]e il dit, Mr Perrault ne pretend point donner[,] par une place dans son livre[,] un titre d’orthodoxie. Je lui ai conseillé, moy, pour faire passer Mr Arnaud et Mr Pascal [19][,] d’emploier aussi feu Mr Claude [20], homme d’un mérite illustre en son genre. • C’est après tout • à un faiseur de tels éloges que convient le
Mr Varillas mourut la semaine derniere [22]. Il estoit agé, infirme et neces[s]iteux, ainsi je ne scais si l’on doit le plaindre d’estre mort. Il i a dix ans l’on auroit plaint le public de l’avoir perdu, mais il semble estre dechu du droit de se faire regretter. Apres tout si les habiles • doivent mesestimer ses ouvrages, le grand nombre continuera tous jours à les lire. En verité cet homme avoit de grands talents pour écrire agréablement l’histoire, c’est dommage pour lui de ne l’avoir point fait sur des mémoires plus exacts ou du moins de n’avoir pas parus dans un temps moins eclairé et moins, si j’ose le dire, eplucheur. Mr l’abbé Fleuri est plus que désigné successeur de Mr de Labruyere [23], quoy qu’il ne soit pas encore elu, et l’on ne parle point qu’il se présente aucun compétiteur.
Je [ne] vous eusse point faict payer le port de la satyre de Mr Despreaux [24], si j’eusse cru que vous l’eussiez eu[e] en Hollande. Elle n’a jamais été imprimée dans le Mercure galand, l’autheur ne l’auroit point souffert. Je scais enfin, quel est Mr Perron autheur du petit livre de l’ Histoire de Marcoussi [25][ :] c’est un homme • d’environ soixante et dix ans grand nouvel[l]iste et principal sup[p]ort du comitté tenant ses scéances au jardin du Luxembourg. Il a esté autrefois precepteur de Messieurs d’Entragues [26], à qui ap[p]artient Marcoussi, et c’est ce qui lui a donné moyen de fouillier dans les archives de cette terre. Ceux à qui je me suis informé, ne scavent point qu’il ait fait aucun autre livre que cette histoire.
J’ay à vous ap[p]rendre sur l’affaire de Bretagne ce que je / scais par Madame la marquise de La Chastre, fille de Mr de Lavardin [27], qu’il s’est faché tout de bon de ce que Mr l’ abbé de Lafayette avoit montré sa lettre et donné occasion à son impression dans le Mercure galand [28], qu’il lui avoit mandé cette nouvelle pour se réjouir et non pas qu’il la cru[t].
Je ne connois qu’un des autheurs contre les quels escrit vostre ami, autheur de la Dissertation sur la pronontiation de la langue françoise [29], l’ abbé Dangeau [30] ; si le non [ sic] de vostre ami n’est pas un mistere[,] je vous prie de me l’ap[p]rendre.
Vostre professeur de Tubinge parle t’il de l’apologie que publia Marc Antoine de Dominis à son retour dans l’Eglise romaine [31] ? Nous l’avons ici.
A propos de Bergier[,] • Mr Oudinet [32] antiquaire du Roy m’a dit q[u]’un de ses amis de Rheims[,] son pais et celui de Berg[i]er[,] avoit son livre, plein de corrections et de notes de la main de • l’autheur. Il doit escrire à Rheims pour l’avoir et nous en aiderons Mr Henninus [33], s’il i a quelque chose de bon pour lui. Ce traducteur devroit faire mettre les médailles dont parle son autheur, nostre siecle aime fort ces sortes de monuments dans les livres. Je ne puis vous taire sur Berger une histoire que je scais d’original. Don Mabillon [34] m’a conté plusieurs fois qu’estant au Mont Cassin en 1687, un religieux de cette abbaye qui le vit plus habile que ceux qu’il avoit coutume de voir, lui fit confidence d’un ouvrage qu’il avoit composé en latin sur les grands chemins de l’empire romain. Don Mabillon fut fort surpris de voir que naturellement il avoit distribué son ouvrage en cinq parties com[m]e Berg[i]er, quoy qu’il vit manifestement par ce qu’il omettoit, qu’il n’eut jamais vu le livre. Le moine italien fut encore bien plus surpris lors qu’il ap[p]rit la nature du livre de Berg[i]er, et remit à croire ce que lui en disoit Don Mabillon, qu’il l’eut vu. Ce père le lui fit venir de France et ce fut Boudot [35] qui le lui envoia.
Mr Leti • n’a plus ici q[u]’un reste de reputation qui ne se soutient qu’à peine. Son Histoire de la reyne Elizabeth lui a fait si grand tort que c’en estoit fait absolument / si son Cromwel[l] n’eut un peu racom[m]odé les choses [36].
J’en demeure d’ac[c]ord, en bonne politique, l’on n’auroit pas dû souffrir ici le livre du Pere Simon [37] ; c’est sacrifier l’intérest public • à l’animosité d’un particulier. Le livre de Mr Arnaud [38] fait trop d’honneur à l’Eglise romaine pour souffrir en pais de catholicité que l’on escrive contre, mais dans quelle communion ne fait on pas des fautes et ne va t’on point souvent • contre l’interest du parti ? On peut dire des disputes de religion ce que Mr de La Rochefoucault a dit de nos dernieres guerres civiles. Chaque parti se soutient moins par sa bonne conduite que par les fautes de ses adversaires [39].
Le P[ère] Le Comte jésuite, revenu de la Chine depuis environ un an, va nous regaler de Mémoires sur l’estat présent du pais [41]. Ils sont distribuez en forme de lettres. Dans une, qui est adressée à Mr de Pontchartrain, il parle des finances du pais, dans une autre, ecrite à Mr de Bouillon, des meubles, etc. Quelques changements qu’il a fallu faire à ce livre ont empeché qu’il n’ait encore paru quoyque imprimé depuis un mois. Le P[ère] Hardouin confrère du P[ère] Lecomte menace le public de quelque ouvrage considérable et extraordinaire, et cache avec soin le sujet sur lequel il travaille. Je crois estre bien fondé à vous dire que c’est sur les Constantins [42].
Je ne vous parle point des panégiriques de Mr Fléchier [43], il[s] doivent estre parvenus chez vous, et le mérite de leur autheur est connu depuis longtemps. • Nous avons aussi quelques nouveaux petits romans, com[m]e Ines de Cordoue [44], dont je ne diré rien, par une raison toute opposée. Mr l’abbé Cordemoy vient de publier un in 12 contre les sociniens [45]. C’est une chose éton[n]ante, que l’on ne puisse escrire contre ces gens là sans se rendre suspect d’estre de leur parti et de prévariquer. Nous verrons si l’on fera le même jugement de Mr Cordemoy. Les Principes de philosophie de Mr Haersoeker [46] sont fort / estimez ici, quoyque peu de gens entrent dans ses sentiments. • Ce livre est un in 4° assez mince. Nous sommes surpris ici de voir un Hollandois escrire en françois si purement et d’un stile si aisé. Un docteur en médecine de la faculté d’Angers, nommé Hunault, vient d’escrire un Discours phisique sur les fièvres [47], qui ont régné les années dernieres, les gens du métier l’estiment assez.
Monsieur Mallement de Messange, dont le non [ sic] vous sera connu par son Histoire de la création, où il a sur le mouvement du soleil des pensées si extraordinaires, et par son livre de la quadrature du cercle, • a publié une response à la critique du Diction[n]aire de l’Académie [48]. L’un et l’autre sont ouvrages assez mediocres. L’un ne dit que ce que tout le monde scait, et l’autre ne répond que ce que persone n’ignore. Un homme de foy vient de m’as[s]eurer que Pezante sieur de Guillebert estoit l’autheur du Détail de la France [49]. Il est lieutenant general au presidial de Rouen.
Le Roy vient de faire frapper soixante médailles qui contiennent les principaux evénements du com[m]encement de son règne [50] qui n’avoient pas encore esté illustré par de semblables monuments. Voilà de quoy faire un • autre volume à l’ Histoire du P[ère] Ménestrier [51]. Mais je crois que recon[n]oissant son incapacité[,] il laissera faire cette besogne à Messieurs de l’Académie des medailles, qui i sont beaucoup plus propres que lui. Ce sont eux qui ont donné le dessein et les devises de celles que l’on vient de frapper.
Nous avons recu de Rome, depuis quelque temps, • des discours latins • à la louange du pape d’aujourd’hui, d’ Alexandre 8 e , de la reyne de Suede et d’autres, d’un nommé Malagonelli [52]. C’est un petit in douze, don[t] la latinité est fort elegante mais un peu empoulée.
J’oubliois à vous dire que j’ay mis dans le paquet que je vous ai en voié un mémoire concernant le procez que Mr le duc de Luxembourg a gagné contre les autres ducs et pairs [53], peu[t]etre l’affaire aura t’elle fait assez de bruit chez vous pour que vous aié souhaitté d’en estre instruit.
Je etc.
A Monsieur / Monsieur Bayle / A Rotterdam •
Notes :
[1] Lettre 1119, que nous ne connaissons que par une copie envoyée par François Janiçon à Jean-Alphonse Turrettini.
[2] Nous ne saurions apporter plus de précisions concernant M. Bousseau, sans doute marchand à Dantzig.
[3] Sur la querelle que les jésuites avaient suscitée à Santeuil à propos de son épitaphe pour Antoine Arnauld, voir Lettre 1013, n.11. L’épitaphe de Santeuil et la traduction – attribuée par Santeuil à Faydit – sont publiées dans le recueil de Santoliana édité par Bernard de La Monnoye, La Vie et les bons mots de Mr de Santeuil, avec plusieurs pièces de poésie, de mélange de littératures, le démêlé entre les jésuites et lui, une autre histoire de ce démêlé, et quelques pièces pour ou contre Mr Santeüil : le tout divisé en deux tomes. Nouvelle édition corrigée et considérablement augmentée (« Cologne, chez Abraham L’Enclume, gendre d’Antoine Marteau » 1735, 12° ; Amsterdam 1752, 12°), p.47 : « Per quem Religio stetit inconcussa, sidesque / Magnanima, et pietas, et constans regula veri. / Contemplare Virum ; se totam agnoscit in illo, / Rugis pulchra suis Patrum ; rediviva Vestustas. » Et « Epigramme sur le cœur de Monsieur Arnauld, transporté à Port-Royal des Champs : Ad sanctas reddit sedes ejectus et exul / Hoste triumphato : tot tempestatibus actus / Hoc portu in placido hac sacra tellure quiescit / Arnaldus, veri defensor, et Arbiter Æqui. / Illius ossa memor sibi vindiet extera tellus. / Huc cœlestis amor rapidis cor transtulit alis, / Cor nunquam avulsum, nec amatis sedibus absens. » Traduction de l’épitaphe : « Chassé quoique vainqueur du sien de sa patrie, / Il revient habiter une maison chérie, / Cet arbitre des mœurs, par qui la vérité / Triompha du mensonge et de l’impiété, / Au port, et dans le sein d’une terre sacrée, / Il goûte, après l’orage, une paix assurée. / Qu’en des lieux inconnus, le sort injurieux / Cache du corps d’Arnauld les restes précieux, / Ici l’amour divin sur ses rapides ailes, / Lui-même a transporté les dépoüilles mortelles / De ce cœur que l’exil n’a jamais détaché / Des saints lieux dont Arnauld fut par force arraché. » La traduction attribuée par Santeuil à Faydit est la suivante : « Enfin, après un long voyage,/ Arnauld revient en ces saints lieux, / Il est au port, malgré ses envieux / Qui croyoient qu’il feroit naufrage. / Ce martir de la vérité / Fut banni, fut persécuté, / Et mourut en terre étrangère. / Heureuse d’être de son corps dépositaire ; / Mais son cœur toujours ferme, et toujours innocent, / Fut porté par l’amour, à qui tout est possible, / Dans cette retraite paisible, / D’où il ne fut jamais absent. » Dans sa lettre à Leibniz du 15 mars 1696, Nicaise évoque également l’« affaire » de Santeuil et la foule d’écrits polémiques de part et d’autre.
[5] Sur cette pièce attribuée à Charles Rollin, voir Lettre 1107, n.65.
[6] Charles-Claude Genest (1639-1719), abbé de Saint-Vilmer, aumônier ordinaire de la duchesse d’Orléans, devait entrer à l’Académie française le 7 septembre 1698. Il s’agit ici de son Portrait de M. de Court (Paris 1696, 8°).
[7] Charles Perrault, Réponse aux « Réflexions critiques de M. D[espréaux] sur Longin » (s.l.n.d., 12°) : voir Lettre 1000, n.8.
[8] Le portrait de Charles Perrault : voir notre illustration, tome IX, n° 10.
[9] Il s’agit peut-être de la publication de Petrus Francius (1654-1704), Specimen eloquentiæ exterioris, ad orationem M. T. Ciceronis pro A. Licin. Archia accommodatum (Amstelædami 1697, 12°), imprimée par Henri Wetstein et dédiée à Frédéric-Guillaume I, roi de Prusse, mais nous n’avons aucune certitude sur ce point.
[10] Charles Perrault, Parallèle des Anciens et des modernes, où il est traitté de l’astronomie, de la géographie, de la navigation, de la guerre, de la philosophie, de la musique, de la médecine, etc. Cinquième et dernier dialogue. Tome quatrième (Paris 1697, 12°).
[11] Perrault, Les Hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, avec leurs portraits au naturel (Paris 1696-1700, folio, 2 vol.) : voir Lettre 1104, n.11.
[12] Sur cette censure des portraits de Pascal et d’ Arnauld, qui furent cependant publiés à part, voir Lettre 1067, n.42.
[13] L’abbé Claude de Précelles, censeur, travailla auprès de l’évêque de Chartres, Paul Godet des Marais, jusqu’à la mort de celui-ci en 1709, puis avec le cardinal de Noailles, tout en étant lié avec Fénelon ; il devait par la suite prendre la défense de la bulle Unigenitus. Voir Fénelon, Œuvres complètes (Paris 1851-1852), x.202 ; BNF f.fr. 19.212, f.125 ; J. Le Brun, « Censure préventive et littérature religieuse en France au début du XVIII e siècle », Revue d’histoire de l’Eglise de France, 61 (1975), p.201-225.
[14] Louis Boucherat (1616-1699), comte de Compans, chancelier de 1685 à 1699.
[15] Michel Bégon (1638-1710), intendant de la Marine. Sur son rôle dans la conception du recueil de Perrault, voir Y. Bézard, « Autour d’un éloge de Pascal : une affaire de censure tranchée par Louis XIV », RHLF, 33 (1926), p.215-224 ; sur sa carrière en tant qu’intendant de la Marine à Rochefort, voir S.E. Chapman, Private ambition and political alliances : the Phélypeaux de Pontchartrain family and Louis XIV’s government, 1650–1715 (Rochester 2004), p.122-129, « The Pontchartrains’ political networks and the naval officers of the pen ».
[16] Hilaire Du Mas, docteur de Sorbonne, conseiller au Parlement, adversaire de Port-Royal qui devait publier quelques années plus tard une Histoire des cinq propositions de Jansénius (Liège 1699, 12°).
[17] Antoine Arnauld, De la fréquente communion, où les sentimens des Peres, des papes et des conciles touchant l’usage des sacremens de pénitence et d’eucharistie sont fidelement exposés (Paris 1643, 4°).
[18] Antoine Arnauld et Sébastien Du Cambout de Pontchâteau, La Morale pratique des jésuites représentée en plusieurs histoires arrivées dans toutes les parties du monde, extraittes ou de livres tres-autorisez et fidellement traduits, ou de mémoires très-seurs et indubitables (Cologne [Amsterdam] 1669-1695, 12°, 8 vol.).
[19] Presque immédiatement parurent, en effet, Les Eloges de Messieurs Arnauld et Pascal, composez par M. Perrault, de l’Académie françoise (Cologne 1697, 12°).
[20] Jean Claude, le grand théologien et controversiste réformé : un tel conseil était évidemment inacceptable pour les censeurs français de l’époque.
[22] Antoine Varillas est mort à Paris le 9 juin 1696. Basnage de Beauval annonce cette nouvelle à Leibniz dans sa lettre du 21 juin 1696, éd. Gerhardt, iii.127. Dubos revient sur les circonstances de cette mort dans sa lettre du 10 août (Lettre 1148 : voir n.21).
[23] Jean de La Bruyère est mort à Versailles le 10 mai 1696 : sa mort est également annoncée par Basnage de Beauval dans sa lettre à Leibniz du 21 juin 1696, éd. Gerhardt, iii.127. Claude Fleury (1640-1723) devait, en effet, lui succéder à l’Académie française, où il entra le 16 juillet 1696.
[24] Sur l’ Epistre XI de Boileau-Despréaux, voir Lettre 1107, n.3.
[25] Dubos apporte ici un complément d’informations en réponse à la question de Bayle du 19 avril : voir Lettre 1105, n.54.
[26] Il s’agit des descendants Pierre de Balsac, seigneur d’Entragues, et d’ Anne-Marie de Graville, parmi lesquels se trouvent François de Balsac, seigneur d’Entragues, qui épousa en premières noces Jacqueline de Rohan, dame de Gié, et, en secondes noces, Marie Touchet, dont il eut Catherine Henriette de Balsac d’Entragues, marquise de Verneuil, la célèbre maîtresse d’ Henri IV. Les aventures de celle-ci conduisirent son père, en compagnie de Charles de Valois, duc d’Angoulême, comte d’Auvergne (fils de Marie Touchet et de Charles IX) et d’un intrigant écossais nommé Morgan, à s’allier avec l’Espagne et la Savoie : ils furent tous trois arrêtés en 1605 ; les comtes d’Auvergne et d’Entragues furent condamnés à avoir la tête tranchée en place de Grève, mais leur peine fut ensuite commuée en détention et le comte d’Entragues fut exilé à Malesherbes.
Perron de Langres (vers 1605-1696) aurait été précepteur des fils du comte d’Entragues. Il s’agirait des fils de François de Balsac par son premier mariage avec Jacqueline de Rohan, fille de François de Rohan, seigneur de Gié et du Verger, et de Catherine de Silly ; leurs fils furent Charles de Balsac, seigneur d’Entragues, qui épousa Marie de La Chastre, et César de Balsac, seigneur de Gié, premier colonel-général des carabiniers, conseiller du roi en ses conseils, lieutenant-général en ses armées et au gouvernement d’Orléans. César, se voyant sans enfants, substitua son nom et ses armes à Léon d’Illiers, fils de sa sœur, Charlotte-Catherine, qui avait épousé Jacques d’Illiers, seigneur de Chantemesle, et Léon d’Illiers fonda la famille des Illiers d’Entragues. Voir La Chesnaye-Desbois, s.v., et V.A. Malte-Brun, Histoire de Marcoussis (Paris 1867).
[27] Sur l’affaire de Bretagne et les prodiges racontés par le marquis de Lavardin et par le Père de Lavardin, voir Lettres 1105, n.43, et 1107, n.28.
[28] Dans sa lettre du 27 avril, Dubos envoie une copie de la lettre du marquis de Lavardin à l’ abbé de La Fayette publiée dans le Mercure galant du mois de mars 1696, p.223-227 : voir Lettre 1107, n.28 et 29.
[29] L’« ami » de Bayle, auteur de la Dissertation sur la prononciation de la langue françoise et sur la nécessité des accens pour la régler et pour la fixer. Avec une critique de ce que deux de nos auteurs ont publié sur la même matière (La Haye 1696, 12°) est inconnu des bibliographes, mais Bayle révèle son nom dans sa lettre du 23 juillet 1696 (Lettre 1137) : il s’agit de Gédéon Huet, pasteur adjoint à La Haye depuis 1693. Les deux auteurs visés par son ouvrage sont l’ abbé de Saint-Réal, De la critique (Paris 1691, 12°), et Nicolas Andry de Boisregard, auteur des Réflexions sur l’usage présent de la langue françoise, ou remarques nouvelles et critiques touchant la politesse du langage (Paris 1689, 12°), qui connurent une deuxième édition (Paris 1692, 12°) et une Suite [...] (Paris 1693, 12°).
[30] Louis de Courcillon de Dangeau (1643-1723), membre de l’Académie française depuis 1682, auteur d’une Lettre sur l’orthographe (s.l. 1694, 8°) et, par la suite, de plusieurs autres ouvrages sur la grammaire et sur l’orthographe publiés sans lieu ni date. Voir M. Eckmann (éd.), Opuscules sur la grammaire de l’abbé de Dangeau (Paris s.d., 8°).
[31] Sur le professeur de Tübingen, Jäger, auteur d’une Histoire ecclésiastique du 17 e siecle et qui « a compilé beaucoup de faits sur les guerres de l’arminianisme et sur les avantures du Pere Paul et de Marc Antoine de Dominis », voir Lettre 1118, n.16.
[32] Marc-Antoine Oudinet (1643-1712), avocat, garde des médailles du Cabinet du roi ; il devait entrer à l’Académie des inscriptions en 1701. Il était en correspondance assez régulière avec Antoine Galland : voir la Correspondance d’Antoine Galland, éd. M. Abdel-Halim, lettres 85, 92, 99, 100, 124, 126, 132, etc.
[33] Henninius était en train de traduire en latin l’ouvrage de Nicolas Bergier, originaire de Reims, Histoire des grands chemins de l’empire romain contenant l’origine, progrès et entenduë quasi incroyable des chemins militaires, pavez depuis la ville de Rome jusques aux extremitez de son empire (Paris 1622 et 1628, 4°) : voir Lettre 1105, n.31. L’orthographe du nom de Bergier est erratique dans le texte manuscrit de Dubos : nous corrigeons entre crochets.
[34] Sur la correspondance de Mabillon, voir D.-O. Hurel (dir.), Erudition et commerce épistolaire. Jean Mabillon et la tradition monastique (Paris 2003). Dubos avait l’habitude de rencontrer Mabillon : voir A. Lombard, La Correspondance de l’abbé Du Bos (1670-1742) (Paris 1913), p.22, et Lettre 1191, n.3 ; Antoine Galland était lui aussi un familier du séminaire de Saint-Germain-des-Prés : voir M. Abdel-Halim, Antoine Galland, sa vie et son œuvre (Paris 1964), p.123-125.
[35] Il s’agit sans doute de Jean Boudot (1651 ?-1706), imprimeur d’origine forézienne installé à Paris, rue Saint-Jacques, près de la fontaine Saint-Séverin : il allait devenir imprimeur du roi en 1701 et publia quelques années plus tard un Dictionarium latino-gallicum (Parisiis 1704, 8°) ; en 1699, il fut nommé directeur de l’imprimerie du prince de Dombes à Trévoux. Voir J.-D. Mellot et E. Queval, Répertoire d’imprimeurs-libraires, XVI e-XVIII e siècle (Paris 1997 ; nlle éd. Paris 2004), s.v.
[36] Gregorio Leti, Historia o vero vita di Elisabetta, regina d’Inghilterra, detta per sopranome la comediante politica (Amsterdamo 1692, 12°), traduite par Louis-Antoine Le Peletier sous le titre La Vie d’Elisabeth, reine d’Angleterre (Amsterdam 1694, 12°). Du même, Historia, e memorie recondite sopra alla vita di Oliviero Cromvele, detto il tiranno senza vizi, il prencipe senza virtu (Amsterdamo 1692, 8°), traduite sous le titre La Vie d’Olivier Cromwell (Amsterdam 1694, 12°, 2 vol.) ; cette traduction est attribuée à Jean Le Pelletier (1633-1711), mais les catalogues n’indiquent pas de distinction claire entre Louis-Antoine Le Peletier et Jean Le Pelletier. Charles de La Motte, La Vie de Coste, éd. M.-C. Pitassi, p.235, affirme que la traduction du premier tome de La Vie d’Olivier Cromwell est due à Pierre Coste. Voir aussi le compte rendu dans le JS du 14 mai 1696.
[37] Bayle avait fait allusion aux Nouvelles observations de Richard Simon dans sa lettre du 9 juin : voir Lettre 1118, n.22.
[38] Il s’agit sans doute de l’ouvrage d’ Antoine Arnauld, Dissertation critique touchant les exemplaires grecs sur lesquels M. Simon prétend que l’ancienne Vulgate a esté faite et sur le jugement que l’on doit faire du fameux manuscrit de Bèze (Cologne 1691, 12°).
[39] La Rochefoucauld, Mémoires de M.D.L.R. contenant les brigues pour le gouvernement à la mort de Louys XIII, guerre de Paris, retraitte de M. de Longueville en Normandie, récapitulation ou abrégé de tout ce que dessus, avec l’emprisonnement des trois princes [...] (Cologne 1662, 12°). Deux autres éditions portent cette même adresse bibliographique ; Amelot de La Houssaye avait publié une nouvelle édition annotée (Villefranche 1686, 12°), qui avait connu un nouveau tirage en 1690. Dubos cite une formule connue de la IV e partie : « La cour même, que la fortune a soutenue, a fait souvent des fautes considérables ; et l’on a vu, dans la suite, que chaque parti s’est plus maintenu par les manquements de celui qui lui était opposé, que par sa bonne conduite. » : éd. Michaud et Poujoulat (Paris 1838), v.454.
[41] Louis-Daniel Le Comte (1655-1728) naquit à Bordeaux en 1655. Membre de la Compagnie de Jésus, il fut ordonné prêtre en 1684 et partit pour le Siam avec le Père Jean de Fontaney. En 1688, il l’accompagna en Chine, où il travailla pendant quatre ans. En 1692, le Père de Fontaney l’envoya en Europe pour y défendre les missionnaires dans la querelle des rites. En 1696, il publia ses Nouveaux memoires sur l’etat present de la Chine (Paris 1696, 8°, 2 vol. ; 2 e éd. Paris 1697, 12°, 2 vol. ; 3 e éd. Paris, 1697-1698, 12°, 3 vol.). Le Père Le Comte avait l’intention de retourner en Chine mais il devint le confesseur de la duchesse de Bourgogne. Il mourut à Bordeaux en 1728. Voir DHGE, s.v. et l’édition par F. Touboul-Boyeure du texte de la deuxième édition de 1697 (Paris 1990).
[42] Dès l’année suivante, le Père Jean Hardouin, S.J., publia son Chronologiæ ex nummis antiquis restitutæ specimen primum. Numismata sæculi Constantiniani (Paris 1697, 4°) ; sa Dissertation sur la pluralité des Constantins ne devait paraître dans les Mémoires de Trévoux qu’en 1704.
[43] Après la publication l’année précédente des Panégyriques des saints et quelques sermons de morale (Cologne 1695, 12°), Valentin-Esprit Fléchier venait de faire paraître des Panégyriques et autres sermons (Paris 1696, 4°), ouvrage recensé dans le JS du 26 mars 1696.
[44] Catherine Bernard, Inès de Cordoue, nouvelle espagnole (Paris 1696, 12°).
[45] Louis-Géraud de Cordemoy, Traité contre les sociniens, ou la conduite qu’a tenue l’Eglise dans les trois premiers siècles en parlant de la Trinité et de l’Incarnation du Verbe (Paris 1696, 12°). Il devait publier l’année suivante une nouvelle polémique contre les sociniens : L’Eternité des peines de l’enfer, contre les sociniens (Paris 1697, 12°).
[46] Nicolas Hartsoeker, Principes de physique (Paris 1696, 4°), ouvrage publié par Jean Anisson.
[47] Pierre Hunauld (1664 -1728), médecin angevin, fils d’un médecin de la faculté d’Angers, devint lui-même médecin en juillet 1694. Il publia notamment Discours physique sur les fièvres qui ont régné les années dernières (Paris 1696, 12°), puis un Discours physique sur les propriétez de la sauge et sur le reste des plantes aromatiques (Paris 1698, 12°). Enfin en 1718, il adressa au premier médecin du roi, Denis Dodart, son Projet d’un nouveau cours général de médecine, où l’on propose, par une nouvelle description du corps humain, l’explication de l’ancienne médecine (Châteaugontier 1728, 12°). Doyen de la faculté, il mourut à Angers en mars 1728. Voir le compte rendu du Discours physique sur les fièvres dans le JS du 11 juin 1696.
[48] Claude Mallemans de Messanges (1646-1733), oratorien, aimait à se distinguer par des titres ambitieux : il avait publié un Nouveau système du monde (Paris 1678, 4°) et L’Ouvrage de la création, traité physique du monde, nouveau système, raisonnemens différens de ceux des anciens et des nouveaux philosophes (Paris 1679, 12°), qui fut suivi d’une Dissertation sur les comètes (Paris 1681, 4°) et d’une dissertation sur Le Grand et Fameux Problème de la quadrature du cercle résolu géométriquement par le cercle et la ligne droite (Paris 1686, 12°). Il s’agit ici de sa Réponse à une critique satyrique intitulée « L’Apothéose du Dictionnaire de l’Académie françoise » (Paris [1696], 12°), dont un compte rendu devait paraître dans le JS du 2 juillet 1696.
[49] Sur cet ouvrage célèbre de Pierre Le Pesant de Boisguilbert, voir Lettre 101, n.32.
[50] Voir M. Veillon, « La science des médailles antiques sous le règne de Louis XIV », Revue numismatique, 152 (1997), p.359-377 ; T. Sarmant, La République des médailles. Numismates et collections numismatiques à Paris du Grand Siècle au siècle des Lumières (Paris 2003), p.101 ; S. de Turckheim-Pey, Médailles du Grand Siècle : histoire métallique de Louis XIV (Paris 2004).
[51] Claude-François Menestrier, S.J., Histoire du roy Louis le Grand par les médailles, emblèmes, devises, jettons, inscriptions, armoiries et autres momunens publics (Paris 1689, folio). Sur l’auteur, voir Lettres 78, n.7, et 671, n.6.
[52] Antonio Malagonelli est l’auteur de nombreuses oraisons. Il s’agit sans doute ici de la nouvelle édition de son ouvrage, Antonii Malagonnellii Florentini Orationes, nova et emendatior editio (Romæ 1695, 12°), qui contient l’ Oratio ad Christinam Suecorum reginam, flaminiæ fines ingressam, parue vers 1660, sans adresse.
[53] Sur ce procès du duc de Luxembourg, qui défendait l’ancienneté de son titre et donc sa préséance par rapport aux autres ducs et pairs, voir Lettre 1107, n.68.