Lettre 1065 : Mathieu de Larroque le fils à Pierre Bayle

Vous voulez bien, Monsieur, que sans avoir l’avantage d’estre connu de vous, je me donne l’honneur de vous escrire, pour vous faire savoir des nouvelles de mon frere [1], je sai • que vous l’honorés d’une part dans vostre estime et dans vostre amitié, et que vous estes entré fort genereusement dans l’affliction dont Dieu a trouvé à propos de nous visiter, il en conserve, je vous asseure, Monsieur, cherement le souvenir dans son cœur, il me l’a témoigné plusieurs foys et surtout à son depart de Paris, le vîn[g]t un d’octobre on le transfera au chasteau d’Angers, que le Roy luy a donné pour prison, il y est assez bien / Dieu mercy, du moins autant qu’on le peut estre lorsqu’on n’a pas toute sa liberté ; le R[évérend] P[ère] de Vitry [2] m’a chargé Monsieur de vous faire mille asseurances de service, il vous auroit escrit il y a long tems, sans plusieurs raisons, la prémiere[,] qu’il est fort occupé à se preparer pour soutenir au premier jour des theses qui luy sont de la derniere importance ; la seconde est qu’il ne savoit de quelle voye se servir pour vous escrire et enfin qu’il attendoit tousjours à vous mander quelque chose d’agrëable touchant mon pauvre frere, s’il ne l’a pas servi comme il souhaitoit et / comme plusieurs ont cru qu’ils [ sic] le pouvoit faire ce n’est nullement sa faute veü qu’il est l’amy le plus genereux et le plus zelé du monde[.] La verité est que les P[ères] j[ésuites] ne font pas tout ce qu’ils veulent, il a pour vous en particulier et une estime et une veneration toute particuliere ; si vous aviés quelque [chose] à faire savoir à mon frere vous le pouves faire par mon canal[.]

Je suis tres parfaitement Monsieur vostre tres humble et tres obeissant serviteur
de Larroque

 
cap[itai]ne au reg[iment] de Piémont

chez Mr Martin marchand de ceinturons

rue Saint Honoré vis à vis la barriere des Sergens

à Paris

ce 14 ^e [décem]bre 1695

A Monsieur / Monsieur Bail / à Roterdam Holande •