[Gouda, le 17 septembre 1696]

A Pierre Bayle, Rotterdam

J’avais espéré recevoir avec le Chevillier [1] la réponse à ma dernière lettre, où j’avais indiqué que je voulais agir de concert avec l’imprimeur en ce qui concerne l’édition des commentaires sur Hiéroclès de votre ami [2]. Donc puisque j’ai à partir bientôt pour Amsterdam, j’ai voulu d’abord apprendre votre opinion et blanchir plusieurs murs avec un seul pot [3]. Si donc l’auteur veut qu’on fasse attention à la forme, à la grosseur des lettres, ou au prix de vente du livre, informez-moi, je vous en prie. Je ferai de mon mieux pour vous contenter.

Quelles nouvelles enfin de Bergier [4] ? Les Parisiens n’ont-ils encore rien envoyé ? Si vous leur écrivez, je voudrais que vous leur demandiez si par hasard ils pourraient obtenir le De Supellectile Romana de Petavius Paulus [5], qu’avec un peu de chance ils joindraient au Thesaurus Grævianus [6].

Afin que ces lettres ne vous parviennent pas tout à fait seules, je leur ai donné pour compagnon ces dissertations récemment apportées d’Allemagne [7]. Elles sont du genre qui d’habitude vous passionne. Vous me les renverrez lorsque vous les aurez entièrement lues. Si vous pouvez vous priver pendant un délai raisonnable du De Viris illustribus Gandavensibus de Sanderus [8] et du De vita Oporini d’ Andrea Jocisco [9], je souhaiterais que vous les ajoutiez.

Continuez de m’aimer comme vous le faites.

Donnée à Gouda le 15 e jour avant les Calendes d’octobre 1696

Notes :

[1Sur l’ouvrage d’ André Chevillier portant sur les origines de l’imprimerie à Paris, voir Lettre 1045, n.1.

[2Sur « un ancien manuscrit de notes d’un homme très érudit sur Hiéroclès » que Bayle cherche à faire publier avec l’aide d’ Almeloveen, voir Lettre 1154, n.8. Il s’agit, comme on l’apprendra par la suite, d’un texte proposé par Pinsson des Riolles : voir Lettre 1208, n.3.

[3Expression proverbiale : « faire d’une pierre deux coups » : voir Lettre 1077, n.9.

[4Sur la traduction latine par Henninius de l’ouvrage de Nicolas Bergier, voir Lettres 1031, n.9, 1105, n.32, et 1125, n.32. Almeloveen attendait toujours les notes de Bergier promises par Oudinet.

[5Paul Petau (1568-1614), dit Paulus Petavius, originaire d’Orléans, conseiller au Parlement de Paris, collectionneur célèbre, dont la très riche bibliothèque comportait de nombreux manuscrits et des ouvrages venus de la bibliothèque de Jean Grolier, de Peiresc, de Lipse et de Jean de Saint-André. Sa bibliothèque fut vendue par son fils, Alexandre, et la reine Christine de Suède acquit bon nombre de ses volumes. Il était le cousin de Jacques Bongars. Il s’agit ici sans doute de son ouvrage Antiquariæ supellectilis portiuncula (Parisiis 1610, 4°) ; voir aussi Lettre 1163, n.5, et le Catalogue des manuscrits et miniatures de feu Monsieur Petau, conseiller à la Grand’Chambre du Parlement de Paris (Paris 1672, 4°) ; Paul Colomiès, Bibliothèque choisie (2 e éd., Amsterdam 1699, 12°), p.195 ; R. Kohlndorfer-Fries, Diplomatie und Gelehrtenrepublik. Die Kontakte des französischen Gesandten Jacques Bongars (1554-1612) (Tübingen 2009), p.88, 98, 126.

[6Sur cet ouvrage monumental édité par Grævius – où devait paraître la traduction de Bergier par Henninius – voir Lettre 1105, n.30.

[7Almeloveen et Bayle font toujours allusion à ces dissertations sans en donner le titre exact : nous ne saurions donc les identifier avec certitude. Il s’agit sans doute – à en juger d’après les formules de la Lettre 1163 – des ouvrages de Jean Hardouin, de Cellarius contre Hardouin et de Thomas de Simeonibus sur Faltonia Betitia Proba : voir Lettres 1128, n.26, 1150, n.15, et 1163, n.11, 12, 15. D’autres « dissertations » sont attendues d’Allemagne, De legione fulminante : voir Lettre 1163, n.13.

[9Andreas Jocisco, Oratio de ortu, vita et obitu Joannis Oporini Basiliensis, Typographicoru Germaniæ Principis, recitata in Argentinensi Academia ab Joanne Henrico Hainzelio Augustano (Argentorati 1569, 8°). Bayle ne cite pas cet ouvrage dans le DHC, mais Du Rondel reviendra sur une citation attribuée à Oporinus dans sa lettre du 1 er octobre 1697 (Lettre 1308).

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