Lettre 1174 : Pierre Bayle à William Trumbull
Mylord [1]
Je vous demande tres humblement la grace d’agreer un exemplaire du Dictionnaire critique que je prens la liberté de vous envoier comme un hommage que toutes les personnes de lettres, et moi plus particulierement, doivent à un seigneur qui aime et connoit les sciences parfaitement, et qui favorise ceux qui les cultivent. C’est de vous, Mylord que cela doit se dire tres justement. Le gentilhomme qui aura l’honneur de vous donner cette lettre [2] et qui a servi longtems dans les armées de Sa Majesté auroit pris tres agreablement cet exemplaire avec lui pour vous le presenter de ma part, s’il n’eut eté embal[l]é déjà avec plusieurs autres que le libraire envoie à Londres. Vos momens, Mylord, etant infiniment precieux, je ne m’etendrai pas a decrire le prix incomparable de la faveur que vous me ferez en recevant de bon œil cet exemplaire, je me contenterai de vos asseurer de ma parfaite reconnoissance et du profond respect avec quoi je suis My lord votre tres humble et tres obeissant serviteur
A Rotterdam le 8 de novembre 1696
Notes :
[1] Sur Sir William Trumbull, secrétaire d’Etat, voir Lettre 1078, n.2. Bayle évite soigneusement d’évoquer la question de la dédicace, demandée par Trumbull (par l’intermédiaire de Michel Le Vassor et de Pierre Sylvestre) et que Bayle avait refusée sous prétexte que le DHC devait paraître anonymement. Or, depuis ce refus, les difficultés du privilège de Leers avaient incité Bayle à revenir sur sa décision et à signer le DHC de son nom : voir Lettres 1104, n.3, et 1165, et le commentaire d’ Henri Basnage de Beauval dans sa lettre du 29 octobre 1696 à François Janiçon (éd. Bots et Lieshout, n° 58, p.119).
[2] Nous apprendrons par la lettre de Michel Le Vassor du 20 novembre que c’est Pierre Basnage de Bellemare qui avait porté la présente lettre de Bayle adressée à Sir William Trumbull : voir Lettre 1177, n.6.
