Lettre 1195 : Pierre Bayle à Jean Cailloué

[Rotterdam,] le 14 e dec[embre] 1696

Monsieur

Il est tres vrai que j’ai eté puissamment sollicité de faire en sorte que Mr Vaillant eut quelques exemplaires de mon Dictionnaire [1] aussi tot qu’aucun autre libraire de Londres, et si je n’avois point scu que Mr Leers s’etoit engagé avec vous de n’en point fournir qu’apres que vos exemplaires seroient arrivez à Londres, je n’aurois pu me dispenser de servir Mr Vaillant en ce • dequoi il me prioit et il me faisoit prier, alleguant meme que vous lui aviez refusé le nombre d’exemplaires dont Mr Leers vous avoit prié de l’accommoder. Mais Monsieur, ayant • scu vos conventions*, je lui ai declaré que je ne pouvois • ni directement, ni indirectement travailler à leur inobservation. C’est ainsi que j’en eusse agi envers tous autres, et à plus forte raison en votre endroit, car je serois ravi de vous temoigner l’inclination que j’ai à vous rendre tous les services possibles. Vous avez lieu d’etre content et de ma conduite, et de celle de Mr Leers, car il est tres vrai qu’aucun libraire de votre ville n’a recu des exemplaires ni n’en recevra aussi tot que vous. Mais depuis qu’on sait l’arrivée du / convoi à Londres, et par consequent que vos exemplaires sont chez vous, je ne crois pas que ce soit rien faire contre vos conventions, ni contre le dessein sincere que j’ay de vous servir, que de donner à Mr Vaillant, et à la recommandation de ses amis ce que j’ai fait, qui est de lui faire tenir un petit nombre d’exemplaires qu’il demande. Vous voiez ma candeur et ma rondeur. Je vous ap[p]ren[d]s à vous meme tout ce qui se passe à cet egard, et je vous croi si raisonnable que je suis persuadé que vous le trouverez bon.

Je vous suis infiniment obligé du soin que vous avez eu des livr[es] que j’ai fait passer sous votre couvert ; j’en ai beaucoup de reconnoissance, et vous fais of[f]re de tout ce qui depend de moi, étant, Monsieur, votre tres humble et obeissant serviteur
Bayle

 

A Monsieur / Monsieur Cailloüé marchand libraire / A Londres

Notes :

[1Sur la rivalité entre les libraires français établis à Londres, François Vaillant et Jean Cailloué, voir Lettres 611, n.5, 1177, n.15 et 1178.

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