[Rotterdam, le 8 avril 1697]

Au très illustre et très savant Pieter Burman Pierre Bayle adresse son salut

Pendant que de jour en jour je repousse la réponse à vos lettres pleines d’humanité qui m’incitaient à vous remercier vivement d’avoir collaboré à notre recherche d’un imprimeur à même de publier les lettres d’anecdotes d’ Hotman que le très illustre Baluze a en sa possession [1], cette nouvelle m’est annoncée par votre ami [2] que l’imprimeur que nous cherchions a été enfin trouvé. Je ne tarde donc pas plus longtemps, et n’attendrai pas que le jour présent passe sans vous écrire, homme très illustre, en même temps pour vous remercier et pour vous féliciter de ce travail de recherche auquel vous venez de participer, parce que pour ce qui est de contribuer à la République des Lettres et de donner du lustre à votre Académie, vous êtes le plus apte entre tous. Ce jour-même, j’écris à Paris pour signaler ce que vous venez de prendre le soin de m’indiquer, et pour demander que ces lettres soient rapidement envoyées ici. Les éclaircissements que vous m’avez communiqués sur Nicolas Valla [3] me satisfont mais, depuis, je suis tombé sur son ouvrage De rebus dubiis, et j’ai observé que les renseignements dont je doutais étaient vrais, dans la mesure où Pasquier l’affirme : il était français, et membre du Parlement de Paris et de Rennes.

Vous êtes très estimé pour vos qualités poétiques, et pour cela vous ne dédaignerez pas de lire des vers faits récemment, vous lirez, je pense, non sans plaisir ce poème de Santeuil [4], chanoine de Saint-Victor à Paris, que je vous envoie et que je vous demande de mettre à la disposition du très illustre Grævius [5], dont le nom et la qualité d’auteur sont parfaitement reconnus. Les flatteries excessives seront certes répugnantes, mais, en laissant de côté celles-ci seulement, je veux que toutes les autres vous agréent. L’occasion de cet ouvrage est la suivante : Santeuil avait fait certains vers inconnus de moi, au sujet de je ne sais quelle parole que le Roi avait prononcée contre sa belle-fille, c’est-à-dire l’épouse du duc du Maine, et le duc lui-même traduisit ces vers en langue vernaculaire. Voilà la raison pour laquelle Santeuil a écrit le poème que je vous envoie.

Mille saluts, homme très illustre, et aimez moi, moi qui fais grand cas de vous et qui vous estime au plus haut point.

Donnée à Rotterdam, le 6 e jour avant les Ides d’avril 1697.

Notes :

[1Sur ce projet d’édition par Baluze des lettres de Jean et François Hotman, voir Lettres 1218, n.3 et 5, 1225, n.2, et 1238, n.2, et 1261.

[2Il semble qu’il s’agisse de Grævius : sur cette recherche d’un imprimeur pour Baluze, voir Lettre 1261, n. 1.

[3Sur Nicolas Valla et l’article du DHC qui lui est consacré, voir Lettre 1218, n.7. La lettre de Pieter Burman à Bayle comportant des informations en réponse à la demande de Bayle ne nous est pas parvenue.

[4Sur Jean-Baptiste Santeuil, voir Lettre 1013, n.11. Il s’agit sans doute d’une pièce qui circulait sous forme manuscrite. Nous ne saurions donc être certains d’avoir trouvé le poème en question : il s’agit peut-être, dans La Vie et les bons mots de Monsieur de Santeüil, avec plusieurs pièces de poésie, de mélange de littérature [...] (nouvelle édition, Amsterdam 1752, 12°), de Salpetria nympha Cantilliaca (poème composé en octobre 1696 : p.248-250), suivi par la traduction, Salpetria, ou la nymphe de Chantilly (p.250-254) et aussi par la traduction du duc du Maine (p.254-258).

[5Jean-George Grævius, professeur d’histoire à l’université d’Utrecht et désormais historiographe de Guillaume III, roi d’Angleterre : voir Lettres 854, n.3, et 1229, n.3.

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