Lettre 1301 : Hervé-Simon de Valhébert à Pierre Bayle

A Paris ce vend[redi] 13 e sept[embre] 1697

Toute paresseuse qu’est ma réponse, Monsieur, elle n’en est pas plus savante. Ce sont deux mortifications pour moi bien vives. La premiere a quelque chose de consolant, puisque les affaires de mon patron en sont la cause : mais pour la 2 e rien ne m’est plus sensible*, en ce que je ne peux payer d’échange les nouveautés dont vous me faites part. Je n’oserois assûrer que notre librairie ne nous produise rien de nouveau ; ce serait excuser une faute par une plus grande, j’aime mieus vous avouer que je n’ai pas eu assés de tem[p]s pour m’informer de ce qui se passe ici, vous me croirez mieus ; et si vous me savés mauvais gré du peu de soin que je pren[d]s de satisfaire au devoir de notre commerce*, au moins ap[p]rouverés-vous la sincerité de l’aveu de ma negligence. Je suis bien fâché de n’avoir pas sû que M. Wetstein devoit imprimer un Suétone, je me serois fait un fort grand plaisir de lui communiquer celui que j’ai de Mr Guyet. Il y a longtem[p]s que • j’ai parlé à M. Grævius et de cet auteur et de quelques / autres que j’avois avec des notes m[anu]s[crite]s de ce critique.

Je n’ai pas encore eu le loisir de lire votre charmant Dict[ionnai]re. J’y verrai avec plaisir les articles que vous y avés don[n]é peri\ tw=n e9tai=rwn, mais les amis de mon patron lui empruntent ce livre volume aprês autre ensorte que j’ai peine à en jouir. Il est vrai qu’aucun auteur n’en a tant don[n]é de lumieres que Athenée, et Stephanus Niger nous en a don[n]é un bel extrait dans son De nimia obsoniorum appetentia qui fait partie d’un volume in 4° de ses opuscules, dont j’ai un exemp[lai]re de l’édition de Milan en 1521 dans lequel j’ai remarqué que l’auteur marque le point interrog[e]ant à la maniere des Grecs, d’où il paroît que le notre n’est que celui des Grecs renversé, ou plutost transposé, en mettant la virgule au dessus du point. Il y a une autre édition de ce livre à Basle en 1532 aussi in 4° qui m’a paru plus correcte, et mieus ordon[n]ée. Je l’ai vu à la bibliotheque du Roi.

A propos de la bibliotheque du Roi, je croi que M. Clément vous aura mandé* qu’il travaille sérieusement à nous en don[n]er le catalogue et ce catalogue sera dans un ordre tout nouveau. Il y a ici depuis plus de 2 ans un jeune et tres savant gentilhomme danois nommé M. / Rostgaard qui en a inventé le dessein et qui en a fait imprimer le projet adressé à M. Clément par une lettre par laquelle il lui témo[i]gne le plaisir qu’il a eu de voir que son dessein se trouve conforme à celui que M. Clement avoit aussi imaginé. Et leur dessein est de mettre toutes les éditions d’un même livre par ordre chronologique et tout de suite depuis l’in folio jusqu’à l’in 64°.

Je me suis trompé quand je vous ai écrit que l’on nous avoit don[n]é une nouvelle histoire de Charles VII. C’est de Henri roi d’Angleterre et je vous prie de reformer cela sur ma lettre. Je ne savois pas que celle de Charles 7 fût de l’ abbé Genest ; et l’on m’a assuré qu’elle n’est pas de lui.

J’ajouterai pour toute nouvelle que les enfan[t]s de feu M. Domat, auteur des Lois civiles dans leur ordre naturel viennent de don[n]er au public le Droit public que leur pére avoit presque mis en etat d’être publié avant sa mort. Ce d[erni]er ouvrage est en 2 voll[umes] in 4°. Vous trouverez ci joint une lettre de mon illustre patron.

Je suis de tout mon cœur et avec toute l’estime possible, Monsieur votre tres humble et tres obeissant serviteur

Simon de Valhébert

Mes complimen[t]s s’il vous plait à M. Leers.

A Monsieur / Monsieur Bayle, professeur / d’eloq[uen]ce et d’histoire / à Rotterdam / Hollande

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