Lettre 1314 : Gijsbert Kuiper à Pierre Bayle

[Campen, le 12 octobre 1697]

A Mr Bayle

Monsieur,

Je appris par vostre lettre, que vous avez mis mes Gordiens entre les mains du medecin de Son Excellence, Mr l’ambassadeur d’ Harlay, et qu’il les fera tenir à ceux, à qui ils sont destinés. Je vous en suis fort obligé, et j’espere avec cela, que vous ne prendrez pas, • en mauvaise part que je m’addresse encore une fois à vous, et que je vous prie, de vouloir avoir les mémes soins pour les encloses, afin qu’elles deviennent [ sic] entre les mains du Pere Pagi et de Mr Nicaise.

La derniere lettre, que ce pere m’a envoiée, est cause que la mienne est si grande ; et j’y repond[s] seulement à un point de l’histoire qui y etoit • compris[e] avec deux ou trois autres, qui me / fourniront encore une assez longue reponse. Le sujet de cette lettre est la famille de Valerien et de son fils Gallien, que je juge n’estre pas assez mise au jour par Mess[ieurs] Tristan, Reinesius, Tillemont, • par le Pere Pagi, et par d’autres sçavan[t]s, qui nous ont donné des collections des medailles. Je me flatte, d’y avoir expliqué des passages de Treb[onius] Pollio, de Victor, de Zosime et d’autres, qui ont esté jusques icy assez obscurs.

Je suis fort aise, que mes Gordiens vous plaisent, et que vous jugez avec moy, qu’il n’y a eu que trois empereurs de ce nom. J’espere que le sçavant • abbé se rendra à vostre sentimen[t]s, et à mes raisons ; et je vous puis asseurer en honnest[e] homme, que je n’estime pas moins son erudition ; ouy, que j’aime ceux qui avancent des • paradoxes, qui donnent occasion aux autres à approfondir la matiere, et à oster les difficultez, qui se rencontrent dans l’histoire ancienne. Et peut etre, que j’en userois de méme s’il ne se trouvoint [ sic] pas en Hollande des gans [ sic] farouches, et impitoyables qui ne donnent pas quartier à la moindre bevuë, ouy méme à une syllabe en y adjoustant plaustra convitiorum scurvillumque verborum ; et • il faut, que je vous dise à cette occasion, qu’on m’envoiera bientost pour la faire imprimer icy, une dissertation tout à fait paradoxe, où Mr Sperlingius taschera de prouver, que les juif[s] n’aient jamais eu propriam pecuniam signatam : et que par consequent tous les sicles, que nous avons, sont faux, et faits à plaisir. J’ay escrit diverses lettres à • ce sçavant homme sur ce sujet, et il s’en faut peu que je ne sois pas de son sentiment. Mais ce sera pomum Eridis ; et je m’imagine que les theologiens et les antiquaires combatteront • cette nouvelle opinion. /

Le pacquet, que Mr Leers m’a envoié, est arrivé à Deventer ; je lui feray sçavoir aussi tost, que j’y seray revenu, ce qui se fera en cinq ou 6 jours, quels livres j’en retiendray.

Je vous prier [ sic] de demander à luy, à quel libraire de Paris il ait addressé le Chronicon de Malela pour le Pere Pagi : ce sçavant religieux le desire voir passionnement, et vous me ferez un singulier plaisir, de lui vouloir dire cela[.]

Votre tresh[umble] serv[iteur]

Cuper

A Campen le 12/2 d’oct[obre] 1697

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