Lettre 1327 : Pierre Bayle à Jean Cailloué

Monsieur

Je vous ren[d]s mille actions de graces de la bonté que vous avez euë de m’eclaircir sur les exemplaires que deux prelats vous ont rendus.

A l’egard des 30 florins que Mr Bayze vous a fait donner avec un exemplaire, je vous dirai que c’est un de mes anciens amis et allié, officier reformé en Irlande. Il vouloit faire deux presen[t]s de mon Diction[n]aire à deux personnes qui lui ont rendu service ; et il me pria de les lui faire tenir le plutot que je pourrois, et avec le plus de rabais du prix qu’il seroit possible. Je pris sur moi le rabais, ne trouvant pas que ce fut une priere civile que de demander cela à Mr Leers, et je f[is] savoir à Mr Bayze qu’au lieu que Mr Leers vendoit en detail chez lui chaque exemplaire 34 livres, il n’en paieroit que 30. Mon intention etoit, et l’est encore de tenir compte à Mr Leers de ces deux exemplaires selon le prix qu’il y a fixé mais de faire trouver cette douceur à mon ami, et si j’avois assez de fortune, je ne voudrois pas que ce petit service me coutat [seu]lement 8 florins, mais le prix total des deux exemplaires. Il [n’en] a eu besoin que d’un, c’est pourquoi je lui ai ecrit que je / [pre]ndrois l’autre et qu’il n’avoit qu’à vous le faire remettre [avec] les 30 florins pour celui qu’il avoit pris. Si vous voulez [cet] exemplaire là Monsieur, rendu chez vous franc et quitte de tous frais, pour la meme somme de 30 florins, il est à vous. Sinon je le ferai revenir en ce pays. Si vous le gardez, vous me ferez tenir quand ce sera votre commodité la somme de 60 florins monnoie de Hollande. Il n’y a rien qui presse.

Disposez de moi en tout ce où je vous pourrai marquer que je suis votre tres humble et obeissant serviteur

Bayle

Pour Monsieur / Cailloüé / Marchand libraire