Lettre 1401 : Jean Bruguière de Naudis à Pierre Bayle

Je n’ai point vû, Monsieur mon très-cher cousin, le livre de Monsieur de Cambrai contre Monsieur de Meaux. Vous n’auriez fait plaisir de m’en dire un mot ; on m’a assuré que M. de Fenelon a grand sujet de se plaindre de M. de Meaux, car on dit qu’il ne lui avoit fait voir ses observations sur le livre de Madame Guyon, que pour en recevoir de bons avis.

Je lis depuis quelques jours L’Apocalypse de M. de Meaux ; votre adversaire y est fort mal mené. Je ne sai point s’il a répondu à ce livre, faites-moi la grace de me l’apprendre : n’oubliez pas je vous en conjure de m’envoïer votre livre dès que vous en trouverez l’occasion.

Vous avez sçû le triste et malheureux sort de M. Brousson. Je l’ai fort regretté, quoiqu’il fût de la faction de votre ennemi ; je ne l’ai point vû. La mere de notre ami de Dublin le vit et lui parla de vous : il dit que vous aviez fait un grand ouvrage, et qu’il n’y avoit qu’un défaut, c’est que vous aviez voulu détruire David. Il dit merveille de votre aîné et de votre savoir, mais que vous n’étiez pas charitable. Tout son procédé m’a prouvé qu’il étoit absolument dévoüé à votre antagoniste.

Adieu, mon cher cousin, croïez moi toujours le plus tendre et le meilleur de vos amis.